Axiome 10



Il ne faut pas pour conserver une chose une cause moindre que pour la créer à l’origine.

De ce que nous pensons en cet instant il ne suit pas nécessairement que nous penserons plus tard. Car la conception que nous avons de notre pensée n’enveloppe ou ne contient pas l’existence nécessaire de la pensée : je puis en effet concevoir une pensée [1] clairement et distinctement, bien que supposant qu’elle n’existe pas. Comme maintenant la nature de chaque cause doit contenir en elle ou envelopper la perfection de son effet (par l’Axiome 8), il s’ensuit clairement qu’en nous ou hors de nous il existe nécessairement à présent même quelque chose que nous ne connaissons pas encore, dont le concept ou la nature enveloppe l’existence, et qui soit cause que notre pensée ait commencé d’exister et aussi qu’elle continue d’exister. Bien que notre pensée ait commencé d’exister en effet, sa nature et son essence n’enveloppent pas l’existence nécessaire plus qu’avant qu’elle existât et a besoin par conséquent pour persévérer dans l’existence de la même force que pour commencer d’exister. Et ce que nous disons de la pensée, nous le dirons aussi de toute chose dont l’essence n’enveloppe pas l’existence nécessaire.


[1Chacun découvre cela en lui-même, en tant qu’il est chose pensante.