Chapitre XIII
De la Faveur, de la Reconnaissance et de l’Ingratitude.
(1) Viennent maintenant la faveur, la reconnaissance et l’ingratitude.
Pour les deux premières, elles sont une inclination qu’a l’âme à vouloir et à faire quelque bien au prochain. Je dis à vouloir quand il s’agit d’un bien fait à celui qui a lui-même fait quelque bien. Je dis à faire quand nous-mêmes avons obtenu ou reçu quelque bien.
(2) Je sais bien que, selon le jugement de la plupart des hommes, ces affections sont bonnes ; j’ose dire néanmoins qu’elles ne peuvent trouver place dans un homme parfait ; car un homme parfait sera mû par la nécessité seule, sans autre cause, à aider ses prochains, et, par suite, il se trouve obligé à aider les plus abandonnés de Dieu. D’autant plus qu’il voit en eux un plus grand besoin et une plus grande misère.
(3) L’ingratitude est un mépris de la Reconnaissance comme l’Impudence de la Honte, et cela sans qu’on ait égard le moins du monde à la raison ; elle naît seulement ou de l’avidité ou d’un égoïsme excessif ; c’est pourquoi elle ne peut trouver place dans un homme parfait.