EII - Proposition 31


Nous ne pouvons avoir de la durée des choses singulières qui sont hors de nous qu’une connaissance extrêmement inadéquate.

DÉMONSTRATION

Chaque chose singulière en effet, de même que le Corps humain, doit être déterminée par une autre chose singulière à exister et à produire des effets dans une condition certaine et déterminée ; cette autre à son tour l’est par une autre, et ainsi à l’infini (Prop. 28 p. I). Puis donc que nous avons démontré dans la Proposition précédente, par cette propriété commune des choses singulières, que nous n’avions de la durée de notre propre Corps qu’une connaissance extrêmement inadéquate, il faudra au sujet de la durée des choses singulières maintenir cette conclusion, à savoir que nous ne pouvons en avoir qu’une connaissance extrêmement inadéquate. C.Q.F.D. [*]


Nos de duratione rerum singularium quæ extra nos sunt, nullam nisi admodum inadæquatam cognitionem habere possumus.

DEMONSTRATIO :

Unaquæque enim res singularis sicuti humanum corpus ab alia re singulari determinari debet ad existendum et operandum certa ac determinata ratione et hæc iterum ab alia et sic in infinitum (per propositionem 28 partis I). Cum autem ex hac communi rerum singularium proprietate in præcedenti propositione demonstraverimus nos de duratione nostri corporis non nisi admodum inadæquatam cognitionem habere, ergo hoc idem de rerum singularium duratione erit concludendum quod scilicet ejus non nisi admodum inadæquatam cognitionem habere possumus. Q.E.D.

[*(Saisset :) Nous ne pouvons avoir qu’une connaissance fort inadéquate de la durée des choses particulières qui sont hors de nous. Démonstration Toute chose particulière en effet, comme le corps humain, doit être déterminée à exister et à agir d’une certaine façon par une autre chose particulière, et celle-ci par une autre et ainsi à l’infini (par la Propos. 28, partie 1) ; or, comme nous avons démontré dans la proposition précédente, par cette propriété commune ; toutes les choses particulières, que nous n’avons de la durée de notre corps qu’une connaissance fort inadéquate, il faut arriver à la même conclusion pour la durée de toute autre chose particulière, savoir, que nous ne pouvons avoir qu’une connaissance fort inadéquate de leur durée.