EIII - Proposition 53


Quand l’Âme se considère elle-même et considère sa puissance d’agir, elle est joyeuse ; et d’autant plus qu’elle s’imagine elle-même et imagine sa puissance d’agir plus distinctement.

DÉMONSTRATION

L’homme ne se connaît pas lui-même, sinon par les affections de son Corps et leurs idées (Prop. 19 et 23, p. II). Quand donc il arrive que l’Âme peut se considérer elle-même, par cela même elle est supposée passer à une perfection plus grande, c’est-à-dire (Scolie de la Prop. 11) elle est supposée être affectée de Joie, et d’autant plus qu’elle s’imagine elle-même et imagine sa puissance d’agir plus distinctement. C.Q.F.D. [*]


Cum mens se ipsam suamque agendi potentiam contemplatur, lætatur et eo magis quo se suamque agendi potentiam distinctius imaginatur.

DEMONSTRATIO :

Homo se ipsum non cognoscit nisi per affectiones sui corporis earumque ideas (per propositiones 19 et 23 partis II). Cum ergo fit ut mens se ipsam possit contemplari, eo ipso ad majorem perfectionem transire hoc est (per scholium propositionis 11 hujus) lætitia affici supponitur et eo majore quo se suamque agendi potentiam distinctius imaginari potest. Q.E.D.

[*(Saisset :) Quand l’âme se contemple soi-même et avec soi sa puissance d’action, elle se réjouit ; et d’autant plus qu’elle se représente plus distinctement et soi-même et sa puissance d’action. Démonstration L’homme ne se connaît soi-même que par les affections de son corps et les idées de ces affections (en vertu des Propos. 19 et 23, partie 2). Quand donc il arrive que l’âme se peut contempler soi-même, par cela même on suppose qu’elle passe à une perfection plus grande, c’est-à-dire (par le Scol. de la Propos. 11) qu’elle éprouve de la joie, et une joie d’autant plus grande qu’elle peut se représenter plus distinctement et soi-même et sa puissance d’action. C. Q. F. D.