Traité politique, VIII, §24
Il faut donner aux syndics et à tout fonctionnaire de l’État non un traitement fixe, mais une rémunération calculée de telle sorte qu’ils ne puissent sans grand dommage pour eux-mêmes, mal administrer la chose publique. Il est juste, cela n’est pas douteux, que les fonctionnaires reçoivent un salaire dans l’État aristocratique, puisque la majeure partie de la population est constituée par la plèbe, à la sécurité de laquelle veillent les patriciens, tandis que ceux de la plèbe n’ont à s’occuper que de leurs propres affaires. Mais comme en revanche (voir le § 4 au chapitre VII) nul ne défend la cause d’un autre que s’il croit, ce faisant, consolider sa propre situation, il faut nécessairement arranger les choses de façon que ceux qui ont la charge de l’État, servent le mieux leurs propres intérêts quand ils veillent avec le plus de soin au bien commun.
Traduction Saisset :
Il n’y aura pour les syndics, et en général pour les fonctionnaires, aucun traitement fixe, mais seulement des émoluments combinés de telle façon qu’ils ne puissent mal administrer la république sans un grand dommage pour eux-mêmes. Car il est juste d’une part d’accorder une rémunération aux fonctionnaires publics, la majeure partie des habitants étant peuple et ne s’occupant que de ses affaires privées, tandis que les patriciens seuls s’occupent des affaires publiques et veillent à la sécurité de tous ; mais d’un autre côté (comme nous l’avons dit à l’article 4 du chapitre VII), nul ne défend les intérêts d’autrui qu’autant qu’il croit par là défendre ses intérêts propres, et par conséquent les choses doivent être ainsi disposées que les fonctionnaires publics travaillent d’autant plus à leur bien personnel qu’ils procurent davantage le bien général.
Syndicis, vel cuicumque status ministro stipendium nullum, sed emolumenta decernenda sunt talia, ut non possint sine magno suo damno rempublicam prave administrare. Nam, quod huius imperii ministris aequum sit, vacationis praemium decerni, dubitare non possumus, quia maior huius imperii pars plebs est, cuius securitati Patricii invigilant, dum ipsa nullam reipublicae sed tantum privatae curam habet. Verum quia contra nemo (ut art. 4. cap. 7. diximus) alterius causam defendit, nisi quatenus rem suam eo ipso stabilire credit, res necessario ita ordinandae sunt, ut ministri, qui reipublicae curam habent, tum maxime sibi consulant, cum maxime communi bono invigilant.