EII - Proposition 29 - corollaire


Il suit de là que l’Âme humaine, toutes les fois qu’elle perçoit les choses suivant l’ordre commun de la Nature, n’a ni d’elle-même, ni de son propre Corps, ni des corps extérieurs, une connaissance adéquate, mais seulement une connaissance confuse et mutilée. L’Âme en effet ne se connaît elle-même qu’en tant qu’elle perçoit les idées des affections du Corps (Prop. 23). Elle ne perçoit pas son propre corps (Prop. 19), sinon précisément par le moyen des idées des affections du Corps, et c’est aussi par le moyen de ces idées seulement qu’elle perçoit les corps extérieurs (Prop. 26) ; ainsi, en tant qu’elle a ces idées, elle n’a ni d’elle-même (Prop. 29), ni de son propre Corps (Prop. 27), ni des corps extérieurs (Prop. 25), une connaissance adéquate, mais seulement une connaissance mutilée et confuse (Prop. 28 avec son Scolie). C.Q.F.D. [*]


Hinc sequitur mentem humanam quoties ex communi naturæ ordine res percipit, nec sui ipsius nec sui corporis nec corporum externorum adæquatam sed confusam tantum et mutilatam habere cognitionem. Nam mens se ipsam non cognoscit nisi quatenus ideas affectionum corporis percipit (per propositionem 23 hujus). Corpus autem suum (per propositionem 19 hujus) non percipit nisi per ipsas affectionum ideas per quas etiam tantum (per propositionem 26 hujus) corpora externa percipit atque adeo quatenus eas habet, nec sui ipsius (per propositionem 29 hujus) nec sui corporis (per propositionem 27 hujus) nec corporum externorum (per propositionem 25 hujus) habet adæquatam cognitionem sed tantum (per propositionem 28 hujus cum ejus scholio) mutilatam et confusam. Q.E.D.

[*(Saisset :) Il suit de là que l’âme humaine, toutes les fois qu’elle perçoit les choses dans l’ordre commun de la nature, n’a point d’elle-même, ni de son corps, ni des corps extérieurs, une connaissance adéquate, mais seulement une connaissance confuse et mutilée. L’âme, en effet, ne se connaît qu’en tant qu’elle perçoit les idées des affections du corps (par la Propos. 23). Elle ne connaît son corps (par la Propos. 19) que par ces mêmes idées des affections du corps, par lesquelles seules elle connaît aussi les corps extérieurs (par la Propos.26) ; par conséquent donc, en tant qu’elle a ces idées, elle n’a point une connaissance adéquate d’elle-même (par la Propos. 29), ni de son corps (par la Propos. 27), ni des corps extérieurs (par la Propos. 25), mais seulement une connaissance confuse et mutilée (par la Propos. 28 et son Scol.). C.Q.F.D.