EIV - Proposition 72


L’homme libre n’agit jamais en trompeur, mais toujours de bonne foi.

DÉMONSTRATION

Si un homme libre agissait, en tant que libre, en trompeur, il le ferait par le commandement de la Raison (nous ne l’appelons libre qu’à cette condition) ; tromper serait donc une vertu (Prop. 24) et conséquemment (même Prop.) il serait bien avisé à chacun de tromper pour conserver son être ; c’est-à-dire (comme il est connu de soi), il serait bien avisé aux hommes de s’accorder seulement en paroles et d’être en réalité contraires les uns aux autres, ce qui (Coroll. de la Prop. 31) est absurde. Donc un homme libre, etc. C.Q.F.D. [*]


Homo liber nunquam dolo malo sed semper cum fide agit.

DEMONSTRATIO :

Si liber homo quicquam dolo malo quatenus liber est, ageret, id ex dictamine rationis ageret (nam eatenus tantum liber a nobis appellatur) atque adeo dolo malo agere virtus esset (per propositionem 24 hujus) et consequenter (per eandem propositionem) unicuique ad suum esse conservandum consultius esset dolo malo agere hoc est (ut per se notum) hominibus consultius esset verbis solummodo convenire, re autem invicem esse contrarios, quod (per corollarium propositionis 31 hujus) est absurdum. Ergo homo liber etc. Q.E.D.

[*(Saisset :) L’homme libre n’emploie jamais de mauvaises ruses dans sa conduite : il agit toujours avec bonne foi. Démonstration Si l’homme en tant que libre, employait quelque mauvaise ruse, il agirait de la sorte par le commandement de la raison (car c’est à cette condition seule que nous l’appelons libre) ; et, par conséquent, employer une mauvaise ruse, ce serait vertu (par la Propos. 24). D’où il résulterait (par la même Propos.) qu’il serait plus utile aux hommes, pour la conservation de leur être, d’agir par mauvaise ruse que de bonne foi ; ce qui revient évidemment à dire qu’il serait utile aux hommes de s’accorder seulement en paroles, mais, dans le fait, de se mettre en opposition les uns avec les autres ; conséquence absurde (par le Coroll. de la Propos. 31). Donc l’homme libre, etc. C. Q. F. D.