EV - Proposition 11


Plus il y a de choses auxquelles se rapporte une image, plus elle est fréquente, c’est-à-dire plus souvent elle devient vive et plus elle occupe l’esprit.

DÉMONSTRATION

Plus il y a de choses en effet auxquelles se rapporte une image ou une affection, plus il y a de causes par où elle peut être excitée et alimentée, causes que l’Âme (par hypothèse) considère toutes à la fois en vertu même de l’affection ; et ainsi l’affection est d’autant plus fréquente, c’est-à-dire d’autant plus souvent vive, et (Prop. 8) occupe l’Âme d’autant plus. C.Q.F.D. [*]


Quo imago aliqua ad plures res refertur, eo frequentior est seu sæpius viget et mentem magis occupat.

DEMONSTRATIO :

Quo enim imago seu affectus ad plures res refertur, eo plures dantur causæ a quibus excitari et foveri potest quas omnes mens (per hypothesin) ex ipso affectu simul contemplatur atque adeo affectus eo frequentior est seu sæpius viget et (per propositionem 8 hujus) mentem magis occupat. Q.E.D.

[*(Saisset :) A mesure qu’une image se rapporte à un plus grand nombre de choses, elle revient plus fréquemment à l’esprit : en d’autres termes, elle se réveille plus souvent dans l’âme et l’occupe davantage. Démonstration A mesure, en effet, qu’une image ou qu’une passion a rapport à plus d’objets, il y a plus de causes capable de l’exciter ou de l’entretenir, et toutes ces causes, l’âme (en vertu de l’hypothèse) les aperçoit par cela seul qu’elle est affectée de cette passion ; d’où il suit que cette passion devra être plus fréquente, en d’autres termes elle se réveillera plus souvent dans l’âme et l’occupera davantage (par la Propos. 8). C. Q. F. D.