Traité politique, VIII, §42
Les gouverneurs envoyés dans les villes ou les provinces doivent être choisis dans la classe sénatoriale, parce que c’est l’office des sénateurs d’avoir le soin des fortifications, des finances, de la milice, etc. Mais les sénateurs envoyés dans les régions quelque peu éloignées ne pourront assister aux réunions du Sénat. Pour cette raison ne seront pris parmi les sénateurs que les gouverneurs destinés à des villes construites sur le territoire national. Ceux qu’on veut envoyer plus loin devront être choisis parmi les hommes ayant atteint l’âge fixé pour l’entrée au Sénat. Mais cette disposition ne suffirait pas à garantir la paix de tout l’État si les villes voisines étaient entièrement privées du droit de suffrage, à moins qu’en raison de leur faiblesse elles ne puissent être ouvertement méprisées, ce qui d’ailleurs ne se conçoit pas. Il est donc nécessaire que les villes voisines soient investies du droit de cité et que dans chacune, vingt, trente ou quarante citoyens (le nombre doit être en rapport avec l’importance de la ville) soient admis au nombre des patriciens ; trois, quatre ou cinq d’entre eux seront chaque année élus sénateurs, et l’un d’eux nommé syndic à vie. Ce sont ceux qui sont entrés au Sénat qui seront envoyés avec un syndic, dans les villes qui les ont élus.
Traduction Saisset :
Les proconsuls qui seront envoyés dans les villes ou dans les provinces devront être choisis dans l’ordre sénatorial ; car c’est l’office des sénateurs de prendre soin des fortifications des villes, du trésor, de l’armée, etc. Mais comme il serait impossible à ces proconsuls d’être assidus aux séances du Sénat, si on les envoyait dans des contrées un peu éloignées, il ne faudra choisir parmi les sénateurs que les proconsuls destinés aux villes qui sont sur le sol de la patrie. Quant à ceux qui rempliront leur mission dans des pays plus lointains, on les élira parmi les patriciens dont l’âge n’est pas éloigné de celui des sénateurs. La question maintenant est de savoir si ces mesures garantiront suffisamment la paix de l’empire dans le cas où les villes qui environnent la capitale seraient complètement privées du droit de suffrage. Pour ma part je ne le crois pas, à moins que ces villes ne soient tellement impuissantes qu’il soit permis de les mépriser ouvertement, chose difficile à concevoir. Je pense donc qu’il sera nécessaire que les villes circonvoisines entrent en partage du droit de l’État, et qu’on prenne dans chacune d’elles vingt, trente ou quarante citoyens (selon la grandeur de la ville) pour les inscrire au nombre des patriciens ; parmi eux, trois, quatre ou cinq, seront choisis chaque année pour faire partie du Sénat, et on en prendra un pour être syndic à vie. Ceux qui feront partie du Sénat seront envoyés comme proconsuls, conjointement avec un syndic, dans la ville où on les aura choisis.
Qui in urbes vel provincias proconsules mittuntur, ex ordine senatorio eligendi essent, quia senatorum officium est de urbium munimentis, aerario, militia etc. curam habere. Sed, qui in regiones aliquantulum remotas mitterentur, senatum frequentare non possent, et hac de causa ii tantummodo ex ipso senatu vocandi sunt, qui urbibus in patrio solo conditis destinantur ; at quos ad magis remota loca mittere volunt, ex iis eligendi sunt, quorum aetas a senatorio gradu non abest. Sed neque hac ratione paci totius imperii satis cautum fore existimo, si nimirum urbes circumvicinae iure suffragii omnino prohibeantur, nisi adeo impotentes omnes sint, ut palam contemni possint, quod sane concipi nequit. Atque adeo necesse est, ut urbes circumvicinae iure civitatis donentur, et ex unaquaque viginti, triginta aut quadraginta (nam numerus pro magnitudine urbis maior aut minor esse debet) cives electi in numerum patriciorum adscribantur, ex quibus tres, quatuor aut quinque quotannis eligi debent, qui ex senatu sint, et unus ad vitam syndicus. Atque hi, qui ex senatu sunt, proconsules in urbem, ex qua electi sunt, mittantur una cum syndico.