Lettre 62 - Oldenburg à Spinoza (22 juillet 1675)
à Monsieur B. de Spinoza,
Henri Oldenburg.
Je ne veux pas, Monsieur, que le commerce épistolaire si heureusement rétabli entre nous souffre une interruption par ma négligence à m’acquitter d’un devoir amical. Votre réponse du 5 juillet m’a appris que vous aviez dans l’esprit de publier votre Traité en cinq parties [1]. Permettez-moi donc de vous engager, dans la sincérité de mon affection, à n’y rien mêler qui ait l’air de compromettre la pratique de la vertu religieuse, tenant compte surtout de ce que ce siècle, dans sa dégénérescence et sa corruption, ne pourchasse rien plus ardemment que des propositions dont les conséquences paraissent fournir un abri aux vices régnants.
Je ne refuserai pas d’ailleurs de recevoir quelques exemplaires de ce Traité ; je vous prierai seulement de les adresser quand le moment sera venu à un négociant hollandais habitant Londres qui me les transmettra. Il ne sera point nécessaire de dire que ces livres m’auront été transmis. Sitôt qu’ils me seront parvenus, il me sera sans aucun doute facile de les répartir entre mes amis et d’en toucher le juste prix. Tenez-vous en santé et quand vous le pourrez, écrivez encore à votre tout dévoué
HENRI OLDENBURG.
Londres, le 22 juillet 1675.