Traité politique, VI, 25



Le conseil réuni, avant qu’aucune proposition lui soit faite, cinq ou six légistes, ou davantage, appartenant au clan qui occupe le premier rang dans la session, se rendront auprès du roi et lui remettront les suppliques ou les lettres s’il y en a, afin de lui faire connaître la situation et de recevoir ses instructions sur ce qu’il veut qu’on propose au conseil. Ces instructions reçues, ils reviendront siéger dans le conseil, et celui qui a la présidence ouvrira le débat. Les suffrages ne seront pas recueillis aussitôt quand il s’agira d’une affaire jugée par l’un des membres comme étant de quelque importance, mais on attendra aussi longtemps que l’urgence de la décision à prendre le permettra. Pendant le temps que le conseil ne siégera pas, les conseillers représentant chacun des clans pourront examiner l’affaire entre eux et, si elle leur paraît de grande importance, consulter d’autres citoyens ayant fait partie du conseil ou candidats au conseil. Si, au moment qui a été fixé pour la réunion du conseil, ils ne sont pas arrivés à s’entendre, leur clan ne pourra pas prendre part au vote (car chacun des clans n’a qu’une voix). Dans le cas contraire, le légiste du clan présentera au conseil l’opinion qui aura été reconnue la meilleure, et les autres clans feront de même. Après avoir entendu toutes ces opinions et les raisons qui les motivent, si la majorité du conseil le juge bon, on procède à un nouvel examen ; la séance sera de nouveau suspendue pour un temps déterminé à l’expiration duquel chaque clan devra faire connaître son dernier avis. Alors seulement devant le conseil réuni en entier, les suffrages seront recueillis et l’opinion qui n’aura pas réuni au moins cent voix, sera définitivement écartée. Les autres seront transmises au roi par tous les légistes appartenant au conseil, afin qu’il choisisse l’opinion qu’il voudra, après avoir eu connaissance des raisons de chaque parti. Les légistes rentreront ensuite dans le conseil où tous attendront le roi, pour savoir de lui, au moment qu’il aura fixé, laquelle des opinions à lui transmises il juge qu’il faut adopter, et ce qu’il décide qu’on fera.


Traduction Saisset :

Quand le Conseil est réuni, avant qu’aucune proposition y soit faite, cinq ou six d’entre les jurisconsultes ou un plus grand nombre appartenant aux familles qui, pendant la session présente, occupent le premier rang, vont trouver le Roi pour mettre sous ses yeux les suppliques et les lettres qui peuvent lui avoir été adressées, pour lui faire connaître la situation des affaires et enfin pour entendre de sa propre bouche ce qu’il ordonne de proposer au Conseil. Cela fait, ils rentrent dans l’assemblée, lui font connaître les ordres du Roi, et aussitôt le premier conseiller, par ordre de rang, ouvre la délibération sur l’affaire dont il s’agit. Si l’affaire paraît à quelques membres avoir une certaine importance, on aura soin de ne pas recueillir immédiatement les suffrages, mais de différer le vote aussi longtemps que la nécessité de la chose l’exigera. Le Conseil se séparera donc jusqu’à une époque déterminée, et, pendant cet intervalle, les conseillers de chaque famille pourront discuter séparément l’affaire en question, et, si elle leur semble très-considérable, consulter d’autres citoyens ayant rempli déjà la fonction de conseillers ou candidats au Conseil. Que si, dans l’espace de temps fixé, les conseillers d’une même famille n’ont pu se mettre d’accord, cette famille sera exclue du vote ; car chaque famille ne peut donner qu’un suffrage. Dans le cas contraire, le jurisconsulte de la famille, après avoir recueilli l’opinion sur laquelle tous les membres se sont mis d’accord, la portera au Conseil, et ainsi pour toutes les autres familles. Si, après avoir entendu les raisons à l’appui de chaque opinion, la majorité du Conseil estime utile de peser de nouveau l’affaire, l’assemblée se dissoudra une seconde fois pour un temps déterminé, pendant lequel chaque famille devra exprimer son dernier avis. Et alors enfin, l’assemblée entière étant présente, et les votes recueillis, tout avis qui n’aura pas réuni cent suffrages pour le moins sera déclaré nul. Tous les autres avis seront soumis au Roi par les jurisconsultes qui auront assisté au Conseil, et le Roi, après avoir entendu les raisons de chaque partie, choisira l’avis qui lui paraîtra le meilleur. Alors les jurisconsultes se retirent, retournent au Conseil et y attendent le Roi jusqu’au moment qu’il a marqué lui-même pour faire savoir à l’assemblée quel est l’avis qu’il a jugé préférable et ce qu’il a résolu.


Congregato concilio, antequam aliquid in eo proponatur, quinque aut sex aut plures iurisperiti ex familiis, quae illa sessione ordine loci priores sunt, regem adeant, ut libellos supplices vel epistolas, si quas habent, tradant, ut rerum statum indicent, et denique ut ex ipso intelligant, quid in suo concilio proponere iubeat ; quo accepto concilium repetant, et qui ordine loci prior est, rem consulendam aperiat. Nec de re suffragia statim colligenda, quae aliquibus videtur alicuius esse momenti, sed in id tempus differenda, quod rei necessitas concedit. Concilio igitur ad id statutum tempus soluto, poterunt interea uniuscuiusque familiae consiliarii de ipsa seorsum quaestionem habere, et, si res iis magni momenti videbitur, alios, qui eodem officio functi vel qui eiusdem concilii candidati sunt, consulere, et, si intra constitutum tempus inter ipsos convenire non poterit, illa familia extra suffragium erit ; nam unaquaeque familia unum tantum ferre suffragium poterit. Alias eius familiae iurisperitus instructus sententiam, quam optimam iudicaverint esse, in ipso concilio ferat, et sic reliqui ; et si maiori parti visum fuerit post auditas cuiusque sententiae rationes, rem iterum perpendere, concilium iterum in tempus solvatur, ad quod unaquaeque familia, quaenam ultima eius sit sententia, pronunciabit, et tum demum praesente integro concilio suffragiis collectis ea irrita habeatur, quae centum ad minimum suffragia non habuerit. Reliquae autem ad regem deferantur a iurisperitis omnibus, qui concilio interfuerunt, ut ex iis, postquam uniuscuiusque partis rationes intellexerit, quam velit, eligat, atque inde digressi ad concilium revertantur, ubi omnes regem ad constitutum ab ipso tempus exspectent, ut, quam sententiam ex latis eligendam censet, omnes audiant, et quid faciendum ipse decernat.