Traité politique, VI, 35
Il ne faut faire la guerre qu’en vue de la paix [1] et, une fois la guerre finie, les armes doivent être déposées. Quand des villes ont été conquises et que l’ennemi est vaincu, il faut poser des conditions de paix telles que les villes prises demeurent sans garnison, ou bien il faut accorder à l’ennemi par traité la possibilité de les racheter, ou bien (si de cette façon la force de leur situation devait toujours inspirer de la crainte) il faut les détruire entièrement et transporter les habitants dans d’autres lieux [2].
Traduction Saisset :
On ne fera la guerre qu’en vue de la paix, de sorte que, la paix faite, l’armée cessera d’exister. Lors donc qu’on aura pris des villes en vertu du droit de la guerre et que l’ennemi sera soumis, au lieu de mettre dans ces villes des garnisons, il faudra permettre à l’ennemi de les racheter à prix d’argent ; ou bien, si, à cause de leur position redoutable, on craint de les laisser derrière soi, il faudra alors les détruire entièrement et en transporter les habitants en d’autres lieux.
Bellum non nisi pacis causa inferendum, ut eo finito arma cessent. Urbibus igitur iure belli captis et hoste subacto pacis conditiones instituendae sunt, ut captae urbes nullo praesidio servari debeant ; sed vel ut hosti, pacis foedere accepto, potestas concedatur easdem pretio redimendi, vel (si ea ratione timor semper a tergo maneat formidine loci) prorsus delendae sunt et incolae alio locorum ducendi.
[1] Sur cette question, voyez la bibliographie donnée sur Caute@Lautre.net : Peut-il être juste de vouloir la guerre ?, notamment Aristote, Hobbes, La Bible, Machiavel,Saint Augustin, Saint Thomas.
[2] Voyez Machiavel, Le Prince, chap. III