Traité politique, VIII, §48
Ceux que la loi oblige à prêter serment, se garderont bien plus du parjure si le serment qui leur est imposé se fait sur le salut de la Patrie et la liberté, ou sur l’Assemblée suprême, que s’ils juraient devant Dieu. Qui jure devant Dieu met en jeu son bien propre dont il est le seul juge ; qui jure par la liberté et le salut de la patrie met en jeu le bien commun dont il n’est pas le juge, et s’il se parjure, il se déclare lui-même ennemi de la Patrie.
Traduction Saisset :
Ceux qui sont obligés par la loi de prêter serment seront plus en garde contre le parjure si on leur prescrit de jurer par le salut de la patrie, la liberté et le conseil suprême, que s’ils juraient par Dieu. En effet, jurer par Dieu, c’est engager son salut, c’est-à-dire un bien particulier dont chacun est juge ; mais jurer par la liberté et le salut de la patrie, c’est engager le bien de tous, dont nul particulier n’est juge ; et par conséquent se parjurer, c’est se déclarer ennemi de la patrie.
Quos lex iurare cogit, a periurio multo magis cavebunt, si per salutem patriae et libertatem, perque supremum concilium, quam si per Deum iurare iubeantur. Nam qui per Deum iurat, privatum bonum interponit, cuius ille aestimator est ; at qui iureiurando libertatem, patriaeque salutem interponit, is per commune omnium bonum, cuius ille aestimator non est, iurat, et, si peierat, eo ipso se patriae hostem declarat.