Traité politique, VII, §23
Je crois connu de soi ce qui a été dit au § 32 du chapitre précédent sur l’admission des étrangers au nombre des citoyens. Je pense en outre que personne ne doute que ceux qui sont proches du roi par le sang doivent être tenus loin de lui et être écartés des affaires, non de la guerre, mais de la paix. C’est un honneur pour eux et une tranquillité pour l’État. Cela même n’a cependant pas paru suffisant aux despotes turcs pour qui c’est une chose sacrée de mettre à mort leurs frères. Rien d’étonnant à cela ; plus absolu est le droit transféré au monarque, plus facilement (nous l’avons montré dans le § 14 de ce chapitre) ce droit peut passer à un autre. Il n’est pas douteux en revanche que, dans la monarchie telle que nous la concevons, où il n’y a pas de soldats mercenaires, il y a pour le salut du roi des sécurités suffisantes.
Traduction Saisset :
Ce qui a été dit, article 32 du précédent chapitre, au sujet des étrangers à recevoir au nombre des citoyens, est assez évident de soi, j’imagine. Personne aussi ne met en doute, à ce que je crois, que les plus proches parents du Roi ne doivent être tenus à distance de sa personne, par où je n’entends pas qu’on les charge de missions de guerre, mais au contraire d’affaires de paix qui puissent donner à l’État du repos et à eux de l’honneur. Encore a-t-il paru aux tyrans turcs que ces mesures étaient insuffisantes, et ils se sont fait une religion de mettre à mort tous leurs frères. On ne doit pas s’en étonner ; car plus le droit de l’État est concentré absolument dans les mains d’un seul, plus il est aisé (comme nous l’avons montré par un exemple à l’article 14 du présent chapitre) de transférer ce droit à un autre. Au contraire le gouvernement monarchique, tel que nous le concevons ici, n’admettant aucun soldat mercenaire, donnera indubitablement au Roi toutes les garanties possibles de sécurité.
Quae de peregrinis in civium numerum recipiendis art. 32. praeced. cap. diximus, per se nota esse credo. Praeterea neminem dubitare existimo, quod ii, qui regi sanguine propinqui sunt, procul ab eo esse debeant, et non belli, sed pacis negotiis distrahi, ex quibus ipsis decus et imperio quies sequatur. Quamvis nec hoc quidem Turcarum tyrannis satis tutum visum fuerit, quibus propterea religio est, fratres omnes necare. Nec mirum ; nam quo magis absolute imperii ius in unum translatum est, eo facilius ipsum (ut art. 14. huius cap. exemplo ostendimus) ex uno in alium transferri potest. At imperium monarchicum, quale hic concipimus, in quo scilicet mercenarius miles nullus est, satis hoc, quo diximus, modo regis saluti cautum fore, extra dubium est.