EII - Proposition 17 - corollaire


Si le Corps humain a été affecté une fois par des corps extérieurs, l’Âme pourra considérer ces corps, bien qu’ils n’existent pas et ne soient pas présents, comme s’ils étaient présents.

DÉMONSTRATION

Tandis que des corps extérieurs déterminent les parties fluides du Corps humain à venir frapper contre les parties molles, les surfaces de ces dernières sont changées (Postulat 5) ; par là il arrive (voir Ax. 2 après le Coroll. du Lemme 3) que les parties fluides sont réfléchies d’une autre manière qu’elles n’avaient accoutumé et que, plus tard encore, venant par leur mouvement spontané à rencontrer les surfaces nouvelles, elles sont réfléchies de la même manière que quand elles ont été poussées contre ces surfaces par les corps extérieurs ; conséquemment, tandis qu’ainsi réfléchies elles continuent de se mouvoir, elles affecteront le Corps humain de la même manière que précédemment et de cette affection l’Âme (Prop. 12) formera de nouveau la pensée ; c’est-à-dire que l’Âme (Prop. 17) considérera de nouveau le corps extérieur comme présent ; et cela toutes les fois que les parties fluides du Corps humain viendront à rencontrer par leur mouvement spontané les mêmes surfaces. C’est pourquoi, bien que les corps extérieurs par lesquels le Corps humain a été affecté une fois n’existent plus, l’Âme les considérera comme présents, autant de fois que cette action du corps se répétera. C.Q.F.D. [*]


Mens corpora externa a quibus corpus humanum semel affectum fuit, quamvis non existant nec præsentia sint, contemplari tamen poterit velut præsentia essent.

DEMONSTRATIO :

Dum corpora externa corporis humani partes fluidas ita determinant ut in molliores sæpe impingant, earum plana (per postulatum 5) mutant, unde fit (vide axioma 2 post corollarium lemmatis 3) ut inde alio modo reflectantur quam antea solebant et ut etiam postea iisdem novis planis spontaneo suo motu occurrendo eodem modo reflectantur ac cum a corporibus externis versus illa plana impulsæ sunt et consequenter ut corpus humanum dum sic reflexæ moveri pergunt, eodem modo afficiant, de quo mens (per propositionem 12 hujus) iterum cogitabit hoc est (per propositionem 17 hujus) mens iterum corpus externum ut præsens contemplabitur et hoc toties quoties corporis humani partes fluidæ spontaneo suo motu iisdem planis occurrent. Quare quamvis corpora externa a quibus corpus humanum affectum semel fuit, non existant, mens tamen eadem toties ut præsentia contemplabitur quoties hæc corporis actio repetetur. Q.E.D.

[*(Saisset) : L’âme pourra apercevoir comme présents les corps extérieurs, quoiqu’ils n’existent pas ou ne soient pas présents, quand une fois le corps humain en aura été affecté. Démonstration Pendant que les corps extérieurs agissent sur les parties fluides du corps humain, de telle façon que celles-ci viennent à frapper souvent les parties les plus molles, il arrive qu’elles en changent les surfaces (par le Post. 5) ; d’où il résulte (voir l’axiome 2 après le corollaire du lemme 3) qu’elles-mêmes se réfléchissent dans une direction nouvelle, et que si plus tard, par leur mouvement alors spontané, elles frappent de nouveau les mêmes surfaces, elles se réfléchiront de la même manière que lorsqu’elles étaient poussées par les corps extérieurs. En conséquence, elles affecteront le corps humain de la même manière qu’auparavant, tant qu’elles continueront à se mouvoir de ces mêmes mouvements de réflexion ; et partant, l’âme humaine (par la Propos. 12) formera de nouveau des pensées, c’est-à-dire (par la Propos. 17) apercevra de nouveau les corps extérieurs comme présents, et cela autant de fois que les parties fluides du corps humain viendront par un mouvement spontané frapper les mêmes surfaces. Ainsi donc, quoique les corps extérieurs par qui le corps humain a été affecté une fois n’existent pas, l’âme humaine les apercevra comme présents autant de fois que se répétera cette action du corps humain que nous venons de décrire.