EIV - Proposition 8
EII - Proposition 21 (et EII - Proposition 21 - scolie) ; EII - Proposition 22.
EIII - Proposition 7 ; EIII - Proposition 11 - scolie ; Ethique III - Définition générale des affects.
La connaissance du bon et du mauvais n’est rien d’autre que l’affection de la Joie ou de la Tristesse, en tant que nous en avons conscience.
DÉMONSTRATION
Nous appelons bon ou mauvais ce qui est utile ou nuisible à la conservation de notre être (Déf. 1 et 2), c’est-à-dire (Prop. 7, p. III) ce qui accroît ou diminue, seconde ou réduit notre puissance d’agir. En tant donc (Déf. de la Joie et de la Tristesse, Scolie de la Prop. 11, p. III) que nous percevons qu’une chose nous affecte de Joie ou de Tristesse, nous l’appelons bonne ou mauvaise ; et ainsi la connaissance du bon et du mauvais n’est rien d’autre que l’idée de la Joie ou de la Tristesse, qui suit nécessairement (Prop. 22, p. II) de l’affection même de la Joie ou de la Tristesse. Mais cette idée est unie à l’affection de la même manière que l’Âme est unie au Corps (Prop. 21, p. II) ; c’est-à-dire (comme nous l’avons montré dans le Scolie de la même Prop.) cette idée ne se distingue, en réalité, de l’affection elle-même, ou (Déf. gén. des Affections) de l’idée d’une affection du Corps, que par la conception que nous en avons ; donc cette connaissance du bon et du mauvais n’est rien d’autre que l’affection même, en tant que nous en avons conscience. C.Q.F.D. [*]
Cognitio boni et mali nihil aliud est quam lætitiæ vel tristitiæ affectus quatenus ejus sumus conscii.
DEMONSTRATIO :
Id bonum aut malum vocamus quod nostro esse conservando prodest vel obest (per definitiones 1 et 2 hujus) hoc est (per propositionem 7 partis III) quod nostram agendi potentiam auget vel minuit, juvat vel coercet. Quatenus itaque (per definitiones lætitiæ et tristitiæ, quas vide in scholio propositionis 11 partis III) rem aliquam nos lætitia vel tristitia afficere percipimus, eandem bonam aut malam vocamus atque adeo boni et mali cognitio nihil aliud est quam lætitiæ vel tristitiæ idea quæ ex ipso lætitiæ vel tristitiæ affectu necessario sequitur (per propositionem 22 partis II). At hæc idea eodem modo unita est affectui ac mens unita est corpori (per propositionem 21 partis II) hoc est (ut in scholio ejusdem propositionis ostensum) hæc idea ab ipso affectu sive (per generalem affectuum definitionem) ab idea corporis affectionis revera non distinguitur nisi solo conceptu ; ergo hæc cognitio boni et mali nihil est aliud quam ipse affectus quatenus ejusdem sumus conscii. Q.E.D.
EIV - Proposition 14 ; EIV - Proposition 15 ; EIV - Proposition 19 ; EIV - Proposition 29 ; EIV - Proposition 30 ; EIV - Proposition 63 - corollaire ; EIV - Proposition 64.
[*] (Saisset :) La connaissance du bien ou du mal n’est rien autre chose que la passion de la joie ou de la tristesse, en tant que nous en avons conscience. Démonstration Nous appelons bien ou mal ce qui est utile ou contraire à la conservation de notre être (par les Déf. 1 et 2) ; en d’autres termes (par la Propos. 7, part. 3), ce qui augmente ou diminue, empêche ou favorise notre puissance d’agir. Ainsi donc (par les Défin. de la joie et de la tristesse qu’on trouve dans le Scol. de la Propos. 11, part. 3), en tant que nous pensons qu’une certaine chose nous cause de la joie ou de la tristesse, nous l’appelons bonne ou mauvaise ; et conséquemment la connaissance du bien et du mal n’est rien autre chose que l’idée de la joie ou de la tristesse, laquelle suit nécessairement (par la Propos. 22, part. 2) de ces deux mêmes passions. Or cet idée est unie à la passion qu’elle représente de la même façon que l’âme est unie au corps (par la Propos. 21, part. 2) ; en d’autres termes (comme on l’a montré dans le Scol. de cette même Propos.), cette idée ne se distingue véritablement de cette passion, c’est-à-dire (par la Défin. génér. des pass.) de l’idée de l’affection du corps qui lui correspond, que par le seul concept. Donc la connaissance du bien et du mal n’est rien autre chose que la passion elle-même, en tant que nous en avons conscience. C. Q. F. D.