La politique, c’est la guerre continuée par d’autres moyens
Expliquez le texte suivant :
On aurait (...), en face de la première hypothèse, qui est : le mécanisme du pouvoir, c’est fondamentalement et essentiellement la répression, une seconde hypothèse qui serait : le pouvoir, c’est la guerre, c’est la guerre continuée par d’autres moyens. Et, à ce moment-là, on retournerait la proposition de Clausewitz [1], et on dirait que la politique, c’est la guerre continuée par d’autres moyens.
(...) Les rapports de pouvoir, tels qu’ils fonctionnent dans une société comme la nôtre, ont essentiellement pour point d’ancrage un certain rapport de forces établi à un moment donné, historiquement précisable, dans la guerre et par la guerre. Et, s’il est vrai que le pouvoir politique arrête la guerre, fait régner ou tente de faire régner une paix dans la société civile, ce n’est pas du tout pour suspendre les effets de la guerre ou pour neutraliser le déséquilibre qui s’est manifesté dans la bataille finale de la guerre. Le pouvoir politique, dans cette hypothèse, aurait pour rôle de réinscrire perpétuellement ce rapport de forces par une sorte de guerre silencieuse, et de le réinscrire dans les institutions, dans les inégalités économiques, dans le langage, jusque dans le corps des uns et des autres.
(...) À l’intérieur de cette « paix civile », les luttes politiques, les affrontements à propos du pouvoir, avec le pouvoir, pour le pouvoir, les modifications des rapports de forces - accentuation d’un côté, renversement -, tout cela, dans un système politique, ne devrait être interprété que comme la continuation de la guerre ; c’est-à-dire qu’ils seraient à déchiffrer comme des épisodes, des fragmentations, des déplacements de la guerre elle-même. On n’écrirait jamais que l’histoire de cette même guerre, même lorsqu’on écrirait l’histoire de la paix et de ses institutions.