Penser la technique

16 août 2003

Les organisations, appareils et machines du monde technique nous sont devenus indispensables, dans une mesure qui est plus grande pour les uns et moindre pour les autres. Il serait insensé de donner l’assaut, tête baissée, au monde technique ; et ce serait faire preuve de vue courte que de vouloir condamner ce monde comme étant l’œuvre du diable. Nous dépendons des objets que la technique nous fournit et qui, pour ainsi dire, nous mettent en demeure de les perfectionner sans cesse. Toutefois, notre attachement aux choses techniques est maintenant si fort que nous sommes, à notre insu, devenus leurs esclaves.
Mais nous pouvons nous y prendre autrement. Nous pouvons utiliser les choses techniques, nous en servir normalement, mais en même temps nous en libérer, de sorte qu’à tout moment nous conservions nos distances à leur égard. Nous pouvons faire usage des objets techniques comme il faut qu’on en use. Mais nous pouvons en même temps les laisser à eux-mêmes comme ne nous atteignant pas dans ce que nous avons de plus intime et de plus propre. Nous pouvons dire " oui " à l’emploi inévitable des objets techniques et nous pouvons en même temps lui dire " non ", en ce sens que nous les empêchions de nous accaparer et ainsi de fausser, brouiller et finalement vider notre être.
Mais si nous disons ainsi à la fois " oui " et " non " aux objets techniques, notre rapport au monde technique ne devient-il pas ambigu et incertain ? Tout au contraire : notre rapport au monde technique devient merveilleusement simple et paisible. Nous admettons les objets techniques dans notre monde quotidien et en même temps nous les laissons dehors, c’est-à-dire que nous les laissons reposer sur eux-mêmes comme des choses qui n’ont rien d’absolu, mais qui dépendent de plus haut qu’elles. Un vieux mot s’offre à nous pour désigner cette attitude du oui et du non dits ensemble au monde technique : c’est le mot Gelassenheit, " sérénité ", " égalité d’âme ".

Dans la même rubrique

17 juin 2005

L’être ne consiste pas dans le fait de regarder l’étant.

Berkeley disait au contraire l’existence des choses c’est d’être perçues.
"Il y a autre chose que ces regards. Il y a ce que les regards voient et regardent. L’être ne consiste pas en regards." (Jean Wahl). Voyez : Perçoit-on ce qui existe ?. (…)

25 avril 2005

l’Être-pour-la-mort.

La mort (...) est une possibilité d’être que l’être-humain [le Dasein] a lui-même à chaque fois à assumer. Avec la mort, l’être-humain se pré-cède lui-même en son pouvoir-être le plus propre. Dans cette possibilité, il y va pour l’être-humain (…)